Financement de l’Agirc et de l’Arrco : Des solutions applicables dès maintenant

Les négociations sur les retraites complémentaires ARRCO et AGIRC seront d’actualité jusqu’à l’été. Le premier acte s’est déroulé le 17 février, la veille du séminaire organisé par l’Ugict à Montreuil :
« Agirc-Arrco : les enjeux de la négociation ».

Le but de cette matinée : présenter la campagne, les outils revendicatifs et les solutions de financement chiffrées et immédiatement opérationnelles et faire le point après cette première journée de négociation.

Après un message vidéo de présentation des enjeux de la pérennité des régimes
 Agirc-Arrco d’Eric Aubin, dirigeant confédéral en charge des retraites, Sylvie Durand, membre du Bureau de l’Ugict-Cgt, est entrée dans le détail des propositions de l’Ugict pour un financement des deux régimes complémentaires tout à fait réaliste, études du GIE Agirc Arrco à l’appui. Un impératif car : « L’Agirc reste un enjeu de Sécurité sociale. Sa suppression renverrait 4 millions de cadres cotisants vers la capitalisation : la Sécurité sociale deviendrait alors un organisme d’assistance aux plus démunis ».

QUELS SONT LES OBJECTIFS DE L’UGICT ET DE LA CGT ?

Il s’agit en premier lieu d’assurer à l’Agirc et à l’Arrco les ressources financières nécessaires pour garantir à terme aux Ictam, comme aux autres salariés, un taux de remplacement minimum de 75 % de leur dernier salaire et d’assurer le maintien des cadres dans le champ commun de la Sécurité sociale, dans l’intérêt commun.

Des sources de financements sont non seulement possibles, mais réalistes :

  •  L’égalité salariale femmes/ hommes (voir article : « L’urgence de l’égalité salariale » page suivante) entraînerait une réduction de moitié, à l’horizon 2040, du déficit de l’Agirc. Pour l’Arrco, l’équilibre financier serait immédiatement rétabli, avec en réserve 13 mois d’allocations par année.
  •  L’alignement des taux de cotisations des deux côtés du plafond de la Sécurité sociale, pour maintenir le même niveau de prestations. Il faudrait augmenter de 2,45 % la cotisation Agirc, soit de 0,93 point pour la part salariale.
    Pour un salaire brut mensuel de 4 000 € : 7,70€. Ainsi, pour le prix d’un paquet de cigarettes par mois, l’Agirc retrouverait son équilibre en 2033. À l’horizon 2040, 95 % des besoins de financement de l’Agirc seraient couverts.
  •   L’augmentation de la garantie minimale de points (GMP). La garantie minimale de points est de 120 points aujourd’hui (contre 144 à sa création). L’Ugict propose de la porter à 150 points. L’augmentation de la cotisation forfaitaire ferait rentrer immédiatement un gros volume de cotisations (1,4 million de cadres cotisent à la GMP). Il faudra attendre, pour bénéficier des prestations, que les salariés aient cotisés toute leur carrière. Avec l’augmentation des cotisations, le déficit serait réduit de 8,57 % en 2040 et les pensions améliorées.
  •   L’élargissement de l’assiette soumise à cotisations sociales en intégrant intéressement, épargne, participation, stock options, etc.

En utilisant simplement deux de ces solutions, l’équilibre de l’Agirc et de l’Arrco serait rétabli. En combinant les quatre, des excédents seraient reconstitués avec pour objectif une augmentation du niveau des pensions et sans reculer l’âge de la retraite.
Il n’y a donc aucune impossibilité à financer l’Agirc et l’Arrco.
Pour le Medef l’objectif est de contraindre les salariés à épargner pour leurs retraites.

LE POINT SUR LES NÉGOCIATIONS

L’objet de cette première réunion de négociation portait sur la méthode, le calendrier et les propositions portées par les différents acteurs. La CGT a fait valoir que ces négociations ne devaient pas reproduire les expériences passées, avec le Medef comme unique prescripteur.

Pour Marie-José Kotlicki, membre de la délégation, la première cible du Medef fut la fusion Agirc-Arrco dès 2019. En détruisant l’Agirc, c’est une clef du dispositif, avec l’Apec, du statut cadre qui disparaît.

Le Medef annonce aussi sa volonté d’ouvrir la discussion sur le statut des cadres. Sa suppression reviendrait à effacer les classifications professionnelles. La reconnaissance des classifications et leur rémunération avec des conséquences pour l’ensemble du salariat car il provoquerait un écrasement généralisé des grilles. La fonction publique, ne serait pas épargnée.

Alors que le Medef admet lui même que la fusion Agirc-Arrco ne réglerait pas les problèmes de financement, il devient clair qu’il s’agit d’accroître la pression sur la baisse du prix du travail et sur le prix du travail qualifié. Le Medef veut réserver un statut cadres aux cadres dirigeants et aux très hauts managers.

La fusion de l’Agirc et de l’Arrco aboutirait au paiement de la retraite des cadres par les non-cadres et siphonnerait très rapidement les réserves de l’Arrco tout en amputant les futures pensions des cadres au nom de l’équité. Une situation qui pousserait les cadres à épargner dans des organismes privés et à sortir du système par répartition. Ainsi, les marchés financiers feraient main basse sur la manne sur l’épargne des cadres.

De toute façon, actifs comme retraités sont concernés : soit des hausses des ressources des régimes pour valider maintenir et améliorer les droits, soit la baisse des retraites.

L’Ugict propose une faible hausse des cotisations pour les cadres, pour maintenir, voire améliorer, les droits et sécuriser le niveau des futures retraites.

QUEL IMPACT SUR LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES

Qu’en sera-t-il de la compétitivité des entreprises ? objecte le Medef. Au nom du pacte de responsabilité, le syndicat patronal s’arcboute sur ses positions : favoriser la compétitivité des entreprises. Il claironne déjà « pas un chouia de plus » de financement des cotisations via la part patronale.

Pourtant, le partage d’efforts est toujours de mise. Ainsi, une éventuelle augmentation des cotisations patronales devrait être aussi partagée. En effet, le monde du travail, depuis 1993 (Réforme Balladur, accords que la CGT n’a pas signé), paie deux fois l’effort financier. Il paie en tant qu’actif ou chômeur et à nouveau comme retraité.

Nous avons chiffré cette « équité » des efforts supplémentaires. Le Medef a ramené sa contribution au rééquilibrage financier des régimes de 60 % (la part patronale) à 40 %. Soit un cadeau de 106 milliards d’euros. La compétitivité des entreprises a-t-elle profité de ces cadeaux ? Il ne semble pas.

Les chiffres émanent du GIE Agirc-Arrco, donc incontestables. Il faut les faire connaître.

TOUS LES SALARIÉS SONT CONCERNÉS

Aujourd’hui, la négociation et le paritarisme, qu’il menace de faire sauter, n’intéresse plus le
Medef. Il a clairement identifié la protection sociale comme source de profits, un « marché du siècle » auquel il faut ajouter celui des complémentaires de santé. Les négociateurs du Medef sont d’ailleurs menés par un assureur. Ce n’est pas un hasard.

Depuis 1993, nous assistons au recul progressif des droits et nous devons combattre le fatalisme qui s’est installé dans la tête des salariés, en affirmant que des leviers de financements existent en dehors des propositions patronales.

En dépit d’une campagne d’envergure sur la fusion inéluctable Agirc-Arrco, menée par les médias, les propositions de la CGT commencent à être reprises. En revanche, les dès resteront pipés si l’on continue à négocier sur les textes du Medef.

Il faut aussi faire bien comprendre que tout le monde est concerné et pas seulement une « poignée de cadres du privé ». Si le patronat réussi à décaler l’âge de l’ouverture des droits à la retraite à 64 ans, par exemple, cette mesure sera adoptée pour le régime général sans débat public, puisque légitimée par la négociation entre « partenaires » sociaux.

C’est la question de la reconnaissance des qualifications qui est posée ainsi que celle du statut cadre.

Si l’Agirc est préservée, la riposte du Medef sera de limiter le périmètre de la définition des cadres aux cadres hauts dirigeants et de supprimer la notion de cadres et assimilés.

Il faut convaincre que financer les régimes est possible et que la CGT a été la seule à avancer des mesures concrètes et chiffrées par l’Agirc et l’Arrco.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *